Français bloqués à l’étranger : « C’est l’échec de la politique sanitaire du gouvernement »

Français bloqués à l’étranger : « C’est l’échec de la politique sanitaire du gouvernement »

L’interdiction de sortir ou de rentrer sur le territoire, « sans motif impérieux », a plongé bon nombre de Français établis hors de France dans le désarroi, au point de faire émerger une pétition rassemblant 16 000 signatures, un hashtag #JeVeuxRentrerChezMoi, et un recours devant le Conseil d’Etat.
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« Le gouvernement a brandi l’arme ultime par facilité. Il est tombé dans le liberticide en prenant cette décision car il n’a pas été capable de mettre en place des contrôles stricts dans les aéroports et dans les ports. C’est l’échec de la politique sanitaire du gouvernement ». Hélène Conway-Mouret, sénatrice PS des Français établis hors de France ne décolère pas depuis l’annonce de Jean Castex le 29 janvier dernier de fermer les frontières aux pays extérieurs à l’Union européenne, « sans motif impérieux ».

« L’absence totale jusqu’alors de contrôles dans nos aéroports et nos ports »

La veille, la sénatrice adressait d’ailleurs une question écrite au ministre de la Santé Olivier Véran dans laquelle, elle l’alertait sur « l’absence totale jusqu’alors de contrôles dans nos aéroports et nos ports, afin de vérifier les tests PCR des passagers arrivant en France ». « Je n’ai pas eu de réponse. Les choix faits par le gouvernement nous plongent dans une incompréhension totale. Même en Europe, nos partenaires européens sont en capacité de faire ces contrôles », appuie-t-elle.

« Nous avons fait un déplacement à Roissy au mois de septembre dans le cadre de la commission d’enquête du Sénat sur l’épidémie de covid-19 et on s’est rendu compte des défaillances du contrôle sanitaire. La doctrine : tester, tracer, isoler, était inexistante. » confirme Damien Regnard, sénateur LR des Français établis hors de France

Depuis le 31 janvier, date de la fermeture des frontières, les conseillers consulaires sont débordés de demandes de Français s’interrogeant pour savoir si la raison de leur voyage pourrait correspondre « aux motifs impérieux ». Ils sont listés dans l’attestation de déplacement téléchargeable sur le site du ministère de l’intérieur. Une vingtaine de motifs y sont définis tels que « l’urgence médicale vitale », « la convocation par une autorité judiciaire ou administrative » ou encore « l’assistance aux personnes âgées, malades ou handicapées ».

« Je reçois chaque jour une vingtaine de mails de cas plus terribles les uns que les autres »

« C’est une liste qui s’allonge de jour en jour. Vous avez des motifs qui sont légitimes mais qui ne sont pas impérieux. Par exemple, vous avez un parent qui a la maladie d’Alzheimer. Il n’est pas en fin de vie, ça n’en fait pas partie. Je reçois chaque jour une vingtaine de mails de cas plus terribles les uns que les autres », explique Damien Regnard.

Une pétition lancée par Yan Chantrel, conseiller élu à l’Assemblée des Français de l’Étranger pour le Canada, a déjà rassemblé plus de 16 000 personnes. Ils demandent « le retrait de cette « décision discriminatoire interdisant l’entrée et la sortie des Français de leur propre pays ». Et les témoignages affluent sur les réseaux sociaux sous le hashtag #JeVeuxRentrerChezMoi.

La question de la légalité de cette mesure sera tranchée prochainement, le Conseil d’Etat a été saisi par plusieurs Français résidant aux Etats-Unis. « Si la loi peut restreindre, de façon strictement proportionnée aux risques sanitaires encourus, et appropriée aux circonstances de temps et de lieu, le droit d’aller et venir sur le territoire français et le droit de le quitter. Il est impossible de restreindre d’aucune façon ou d’interdire à un ressortissant français de revenir en France », assure dans le Figaro, Me Pierre Ciric, avocat à New York qui a déposé le recours devant la plus haute juridiction administrative.

Damien Regnard déplore cette décision prise « à la va-vite et sans la consultation des élus établis hors de France, mais surtout l’atteinte aux libertés fondamentales qu’elle entraîne. L’élu met en avant l’article 4 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales selon lequel, « nul ne peut être privé du droit d’entrer sur le territoire de l’Etat dont il est le ressortissant, mais aussi le droit à la vie privée. « Les compagnies aériennes recrutent des agents locaux qui sont en charge de contrôler les justificatifs des passagers au départ de l’avion. Mais de quel droit un agent d’une compagnie aérienne peut décider si votre certificat médical est valable ? Où est le secret médical ? C’est de toute manière totalement inopérant et incohérent. Pourquoi interdire l’entrée sur le territoire en provenance de pays non européen alors que le Portugal, par exemple, est fortement touché par l’épidémie ? Vous pouvez aussi prendre un avion à destination d’un autre pays européen et rejoindre la France par la suite. J’ai eu aussi l’exemple de résidents au Royaume-Uni, qui ont eu leurs deux doses de vaccins contre le covid mais qui, malgré ça, ne peuvent pas rentrer en France ».

« Les Français sont tout à fait prêts à suivre les protocoles sanitaires qui seront mis en place ; Mais qu’on les laisse rentrer chez eux », conclut Hélène Conway-Mouret.

 

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