Sarkozy mis en examen : la droite défend (ou pas) l’ancien Président

Sarkozy mis en examen : la droite défend (ou pas) l’ancien Président

Les responsables LR montent plus ou moins au créneau pour défendre Nicolas Sarkozy. Ils veulent éviter l’idée que l’affaire puisse éclabousser l’image de la droite. Certains relancent la thèse d’une « manipulation », comme le sénateur LR Alain Houpert, qui compare même la situation à « l’affaire Dreyfus ».
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« Vous n’aurez pas beaucoup de réactions » prédit une sénatrice LR. « Ce n’est vraiment pas le moment, je n’ai pas le temps » expédie une autre. Après la mise en examen de Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement présumé de sa campagne de 2007 par la Libye de Mouammar Kadhafi, tous les parlementaires LR ne se bousculent pas pour prendre la défense de l’ancien chef de l’Etat. Une forme de malaise palpable dans le camp de la droite, déjà plombée ces dernières années par les affaires Bygmalion, avec Jean-François Copé, puis la déflagration autour de la candidature de François Fillon, en 2017.

Nicolas Sarkozy nie en bloc

Nicolas Sarkozy est mis en examen des chefs de corruption passive, financement illégal de campagne électorale et recel de détournements de fonds publics libyens. Pour l’ancien Président, qui multipliait les sorties publiques ces dernières semaines, comme au Sénat sur la réforme de la Constitution, il ne s’agit pas de la première affaire. Il a été renvoyé en correctionnelle en février 2017 par le même juge Serge Tournaire pour financement illégal de campagne électorale, mais celle de 2012. Une autre affaire, celle des écoutes, menace aussi l’ancien chef de l’Etat. Dans l’affaire Bettencourt, Nicolas Sarkozy a en revanche bénéficié d’un non-lieu.

Devant les juges, Nicolas Sarkozy continue de nier en bloc. Selon Le Figaro, qui a publié des propos tenus par l’ancien chef de l’Etat lors de sa garde à vue, il a affirmé vivre depuis 2011 « l’enfer de la calomnie ». « Je suis accusé sans aucune preuve matérielle par les déclarations de M. Kadhafi, de son fils, de son neveu, de son cousin, de son porte-parole, de son ancien premier ministre et par les déclarations de M. Takieddine (l'intermédiaire franco-libanais, ndlr) dont il est avéré à de multiples reprises qu'il a touché de l'argent de l'État libyen », a déclaré Nicolas Sarkozy, qui va s’exprimer ce soir lors du 20 heures de TF1.

« Ni désarroi, ni malaise » assure Fabien di Filippo

D’autres élus et responsables de droite font quand même le travail et montent au créneau. Le président de LR, Laurent Wauquiez, s’est simplement fendu d’un tweet, avant sa mise en examen, dénonçant le choix « humiliant et inutile » de la garde à vue. Certains ont trouvé ça un peu léger, alors que le climat s’était tendu entre les deux hommes après la publication de propos de Laurent Wauquiez devant des étudiants.

Le député LR Fabien di Filippo, secrétaire général adjoint des Républicains, assure à publicsenat.fr, qu’il n’y a « ni désarroi, ni malaise » à droite face à cette nouvelle mise en examen de Nicolas Sarkozy. « C’est une étape de la procédure. Il a pu exprimer sa version des faits. A ce stade, on n’a pas les éléments pour se déterminer. Il est présumé innocent et il a l’air déterminé » réagit le député de la Moselle. Il « ne souhaite pas que ce remue-ménage » éclipse l’actualité, « une semaine où l’activité est lourde sur le plan législatif et social. On a beaucoup à dire sur l’injustice de la politique de ce gouvernement ».

« Une justice assimilable à la Terreur » pour Sophie Primas

La sénatrice LR Sophie Primas, elle aussi secrétaire générale adjointe de LR, a « une pensée particulière pour l’homme et une forme d’affection pour lui ». Elle dénonce la « médiatisation de toutes les affaires de justice, ça devrait nous interroger » a-t-elle souligné sur l’antenne de Public Sénat. « La défense, ça se passe dans une cour de justice, ça ne devrait pas se passer dans un tribunal populaire. (…) On ne peut plus accepter qu’on ait une justice assimilable à la Terreur. On est revenu sur une justice populaire, les tribunaux populaires. Tout le monde a son avis, sans connaitre le fond des dossiers, sans écouter la défense » ajoute Sophie Primas. Regardez :

« Une justice assimilable à la Terreur », réagit Sophie Primas après la mise en examen de Nicolas Sarkozy
00:25

Viser et mettre en cause l’impartialité de la justice, c’est aussi, pour la droite, la défense habituelle dans ce genre d’affaire. L’ancien ministre et sénateur LR du Nord, Marc-Philippe Daubresse, émet ainsi des doutes. « Je m’interroge. Où sont les faits matériels ? Où sont les indices graves et concordants ? C’est très grave de mettre en cause l’honneur d’un homme qui a sauvé la France de la crise de 2008 et qui a fait la guerre à la Libye à la tête d’une coalition internationale. Sauf à ce que nous ne soyons pas au courant de tout, je pense qu’il aurait été tout à fait possible de mettre Monsieur Sarkozy sous le statut de témoin assisté ».

Alain Houpert : « C’est comme dans l’affaire Dreyfus, systématiquement, il y a du harcèlement »

Le sénateur sarkozyste Alain Houpert, en fidèle défenseur du chef de l’Etat, use d’arguments qui rappellent les accusations de machination et de cabinet noir des fillonistes, lors de la campagne présidentielle 2017. « Cette mise en examen arrive au moment où Nicolas Sarkozy remonte dans les sondages d’opinion. Les Français s’aperçoivent qu’il est quelqu’un de bien. Et peut-on apporter une once de crédibilité aux propos de Takieddine et de la famille Kadhafi ? (…) On est dans une manipulation » affirme-t-il à publicsenat.fr. Pour Alain Houpert, « c’est comme dans l’affaire Dreyfus, systématiquement, il y a du harcèlement ». Le sénateur LR de Côte-d’Or ajoute : « On peut se servir de la justice pour des visions qui dépassent l’ordre général, qui peuvent être politiques ou dogmatiques ». Autrement dit, si Nicolas Sarkozy est mis en examen, il s’agit d’un complot politique pour lui nuire. Le sénateur reconnaît que la situation « sert Nicolas Sarkozy, car elle le met en position de victime », l’un des autres axes de défense.

Le député Julien Aubert, lui aussi secrétaire général adjoint des Républicains, s’étonne du timing. « Les premières accusations datent de 2011 et vous avez une mise en examen en 2018. On marche sur la tête. Pour François Fillon, on a réussi en 48 heures à ouvrir une enquête et avoir une mise en examen rapide » s’étonne le député LR du Vaucluse, qui note que « pour le moment, il n’a jamais eu de condamnation ».

« C’est surtout plus embêtant pour toute la classe politique. Ça donne l’impression qu’on est capable de faire des guerres pour des raisons de campagne électorale »

Politiquement, pour la droite, ce retour du climat des affaires n’est pas forcément bon, au moment où Laurent Wauquiez vise la reconstruction de sa famille politique. Mais les responsables du parti écartent un tel risque. « C’est Nicolas Sarkozy  ad hominem qui est visé, il n’est pas affilié à un parti. On le connaît plus comme ex-Président que chef de la droite. Je ne crois pas du tout qu’il y aura d’impact sur la droite » assure cet autre député, haut responsable de LR. Manière aussi de prendre ses distances. Fabien di Filippo ne veut pas non plus tout mélanger : « C’est une affaire qui a débuté il y a 7 ans, avec à chaque fois des relances. Mais ce n’est pas lié au travail de reconstruction qu’on est en train de mettre en œuvre. Aujourd’hui, ce qui fait notre crédit, ce sont des valeurs claires qu’on porte ».

Selon Julien Aubert, « c’est surtout plus embêtant pour toute la classe politique. Ça donne l’impression qu’on est capable de faire des guerres pour des raisons de campagne électorale, qu’on laisse entendre qu’il y a des porteurs de valise, alors qu’on cherche à moraliser la vie politique. Ça encourage le « tous pourris ». Ça jette l’opprobre sur la classe politique ». Et y compris, donc, même indirectement, sur Les Républicains.

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