Fin du timbre rouge, réductions de tournées des facteurs : La Poste poursuit ses mutations

Fin du timbre rouge, réductions de tournées des facteurs : La Poste poursuit ses mutations

La perspective d’une réorganisation expérimentale des tournées postales est accueillie avec compréhension ou inquiétude au Sénat. L’information arrive quelques jours après la suppression du timbre rouge dédié aux lettres prioritaires.
Guillaume Jacquot

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

L’année des mutations. L’annonce, juste avant le jour de l’an, de la suppression du timbre rouge, destiné à l’affranchissement des lettres prioritaires, avait déjà marqué la fin d’une époque pour la Poste. Un nouveau chantier vient illustrer les profondes mutations que traverse l’opérateur postal.

Le volume de courrier a chuté vertigineusement en quelques années, passant en 2008 de plus de 18 milliards de lettres, à seulement 7 milliards en 2022. Selon France Info, l’entreprise va expérimenter la suppression de la tournée quotidienne de ses facteurs dans 68 secteurs. Chaque journée, le plan de distribution changera, en fonction des priorités, mais colis et recommandés seront toujours livrés sur un rythme journalier.

« Le but de la suppression du timbre rouge, c’est de faire des économies »

Ancien co-rapporteur d’un groupe sénatorial de travail sur l’avenir de la Poste, Patrick Chaize (LR) y voit une certaine logique derrière cette idée. « Dès lors qu’on n’a plus le timbre rouge, qu’on dit que la norme ce n’est plus une distribution à J + 1 mais à J + 3, il est a priori assez normal qu’il y ait une réorganisation de la distribution, ça ne me choque pas », note le sénateur de l’Ain. « C’est même rassurant. Le but de la suppression du timbre rouge, c’est de faire des économies. »

Celles-ci sont d’ailleurs substantielles. La fin du timbre rouge entraîne l’arrêt de cinq vols aériens chaque jour. « L’ordre de grandeur, c’est 500 millions d’euros », évalue le parlementaire, spécialiste des questions postales. De quoi réduire de moitié le déficit de la mission de service postal universel de l’entreprise, en tenant compte de la dotation versée chaque année par l’État.

La fin de la distribution du courrier à J + 1 faisait d’ailleurs partie des recommandations de la mission sénatoriale formulées en 2021. « On a été entendu. Car la mesure coûtait cher, elle était quasiment luxueuse, et n’était pas atteinte, en termes de respect des engagements. Le J + 1 ne correspondait plus aux conditions de nos vies », souligne Patrick Chaize.

Autre rapporteur de l’ancienne mission sénatoriale, Pierre Louault (Union centriste) s’inquiète des conséquences pour certaines populations d’une fréquence réduite de passage. « Pour moi, ce n’est pas forcément la bonne solution. J’aurais préféré qu’on maintienne un passage, pour les personnes âgées », souligne le sénateur, implanté dans un village de Touraine. « Il faut que ça fasse l’objet d’un débat. Je pense qu’il faut mutualiser les services, discuter avec les élus locaux, les services d’aides à domicile, de portage des repas », imagine celui qui a été maire de Chédigny pendant 40 ans.

« Ce ne sont pas des bons signes pour la pérennité de nos services publics »

À gauche, les récentes nouvelles inquiètent. « Ce ne sont pas des bons signes pour la pérennité de nos services publics », s’inquiète le socialiste Rémi Cardon, dans un communiqué. Le sénateur de la Somme, co-rapporteur de la mission sénatoriale, admet que la réduction du volume de courriers postés « interroge sur la nature du rôle du facteur », mais que « la fin de la distribution du courrier papier ne doit pas signifier la fin de celui qui le distribue ».

C’est d’ailleurs là l’une des préoccupations des syndicats, qui estiment que ces décisions vont provoquer une réduction du nombre de facteurs à terme. Des craintes « légitimes », selon Rémi Cardon, car les annonces « ne sont accompagnées d’aucune vision pour l’avenir du service public postal ».

Dans la lignée du rapport, le sénateur encourage notamment à former les facteurs pour détecter les difficultés administratives des Français les plus éloignés du numérique. Une préconisation que rappelle également Pierre Louault. « Je pense que l’État, qui a fait d’énormes économies, dans sa manière de fonctionner avec les citoyens, pourrait peut-être trouver un accord avec La Poste pour répondre à la précarité administrative. »

Dans la même thématique