Hausse des tarifs des complémentaires santé : Olivier Véran met un coup de pression
Les sénateurs de la commission des affaires sociales ont auditionné ce 14 octobre le ministre de la Santé sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2022. L’occasion pour eux de sonder l’exécutif sur une éventuelle reconduction de la contribution des mutuelles.

Hausse des tarifs des complémentaires santé : Olivier Véran met un coup de pression

Les sénateurs de la commission des affaires sociales ont auditionné ce 14 octobre le ministre de la Santé sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2022. L’occasion pour eux de sonder l’exécutif sur une éventuelle reconduction de la contribution des mutuelles.
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En 2022, si tout se passe bien sur le front sanitaire, le déficit de la Sécurité sociale devrait refluer bien plus significativement que cette année. Avec l’amélioration de l’activité, et donc des rentrées de cotisations, il devrait atteindre 21,6 milliards d’euros. Un progrès non négligeable après celui de 34,6 milliards estimé pour 2021, ou encore le déficit record de 38,7 atteint en 2020, première année de la crise sanitaire. Comme chaque année, en amont des débats budgétaires, le ministre de la Santé était auditionné ce 14 octobre par la commission des affaires sociales du Sénat sur le nouveau projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).

Pour Olivier Véran, il s’agit d’un texte « ambitieux » et « responsable ». Il poursuit les engagements du Ségur de la santé, à hauteur de 12,5 milliards d’euros, principalement des revalorisations salariales. Le soutien aux salaires s’étend au médico-social avec 800 millions d’augmentations. Deux milliards d’euros sont fléchés vers les investissements dans les hôpitaux, les Ehpad ou encore le numérique. L’hôpital est ménagé cette année. « Chaque année, il y a toujours entre 700 millions et 1,2 milliard d’euros d’économies cachées. Là, il n’y en a aucune », s’est félicité Olivier Véran.

L’enveloppe destinée au financement des médicaments est aussi élargie. Le PLFSS 2022 compte aussi une série de mesures à destination des particuliers, comme la contraception gratuite jusque 25 ans. Signe que la crise n’est pas totalement finie, le texte réserve une provision de 4,9 milliards d’euros pour faire face au coût lié au covid-19, dont 3,3 milliards pour la campagne vaccinale de la troisième dose des plus de 65 ans et des personnes atteintes de comorbidités.

« Toute mesure d’économie semble exclue »

Ces orientations ont été accueillies avec vigilance de la part de la nouvelle rapporteure générale de la commission des affaires sociales, Élisabeth Doineau (Union centriste). « Ce PLFSS est le dernier du quinquennat. J’ai envie de dire que cela se sent. Toute mesure d’économie semble exclue. » La sénatrice se demande si le montant du transfert de la dette sociale (136 milliards d’euros) vers la caisse d’amortissement, voté l’an dernier, est déjà caduc.

Les trajectoires des comptes sociaux, présentés dans les annexes du PLFSS, nourrissent des inquiétudes au Sénat, où la droite et le centre sont majoritaires. Le ministre chargé des comptes publics, Olivier Dussopt, lui aussi, présent, a prévenu qu’un retour vers des niveaux plus soutenables prendrait du temps. « Ce déficit va continuer l’année suivante, mais il va rapidement se stabiliser autour de 15 milliards d’euros ». Les réformes structurelles sont renvoyées à l’avenir. « Nous considérons que les conditions ne sont pas encore réunies pour que nous puissions envisager dès ce PLFSS des mesures structurelles », a indiqué Olivier Dussopt.

Forcément, la commission des affaires sociales a voulu soumettre quelques idées de recettes supplémentaires au gouvernement. La rapporteure générale a ainsi demandé pourquoi le gouvernement ne proposait-il pas de prolonger la taxe exceptionnelle pesant sur les complémentaires, qui a été instaurée sur les exercices 2020 et 2021. Il y a un an, le Sénat avait déjà tenté de relever le niveau de contribution de ces organismes, qui avaient réalisé de substantielles économies avec le renoncement de certains soins durant les confinements.

« À ce stade », il n’y aura pas de nouveau prélèvement, a répondu le gouvernement. Néanmoins, les ministres doutent des engagements et de l’argumentation des mutuelles. Celles-ci ont mis en avant des « effets de rattrapage ». « Nous considérons que ce rattrapage n’est pas à la hauteur de l’économie de constatation », a fait valoir Olivier Dussopt. Olivier Véran s’est montré encore plus méfiant, face à la perspective d’une hausse des cotisations des assurés. « Sur deux milliards d’euros d’économies, on en a pris 1,5 milliard les années précédentes. Donc la question se posait légitimement. Le choix, qui a été fait, a été de ne pas prélever de taxe complémentaire, mais de demander avec fermeté à l’ensemble des organismes complémentaires de modérer la hausse des cotisations pour l’année 2022. »

« Le message n’aurait peut-être pas été suffisamment clair ou peut-être pas suffisamment audible »

Et pour le moment, les ministres ont la désagréable sensation de ne pas avoir été écoutés. « Les premières prises de position de certains acteurs du monde des complémentaires annonçant que la hausse des contrats sera au moins égale à celle de l’inflation me laissent présager que le message n’aurait peut-être pas été suffisamment clair, ou peut-être pas suffisamment audible, auquel cas, comptez sur ma mobilisation de toutes mes capacités de conviction pour rappeler les engagements que nous avons demandés. »

Un autre marqueur de la majorité sénatoriale lors des examens des budgets de la Sécurité sociale, a été rappelé aux ministres : la réforme des retraites. L’an dernier, le Sénat avait voté un report à 63 ans de l’âge légal de départ. « Je suppose que si on propose d’allonger la durée de travail, vous donnerez un avis favorable, compte tenu que ça répond à vos ambitions », a glissé le sénateur LR René-Paul Savary, encore échaudé par les prévisions données la veille lors des questions au gouvernement. « Sachez que, d’ici à 2030, ce déficit s’élèvera en moyenne à 10 milliards d’euros par an, soit un horizon de 100 milliards d’euros au total », a prévenu Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État chargé des retraites.

Tant que l’examen du PLFSS n’est pas achevé au Parlement (il aura lieu en novembre au Sénat), virtuellement, tout reste possible, puisque le PLFSS est probablement le dernier texte dans lequel le gouvernement pourrait insérer une mesure paramétrique. Olivier Dussopt a redonné la position de Matignon : « Les conditions pour rouvrir le débat sur la réforme des retraites ne sont pas réunies ». Et de décliner malicieusement l’invitation sénatoriale : « Vous devinez quel type d’avis cela peut amener sur des mesures paramétriques que vous proposeriez avec l’enthousiasme des années précédentes. »

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