Avant son meeting au Zénith, « Macron veut affaiblir Pécresse car il sait que le sujet, c’est un second tour face à elle »

Avant son meeting au Zénith, « Macron veut affaiblir Pécresse car il sait que le sujet, c’est un second tour face à elle »

Mauvaise semaine pour Valérie Pécresse, après une série de ralliements d’élus de droite à Emmanuel Macron. Des « débauchages individuels », minimisent les soutiens de la candidate, qui veulent y voir un signe de fébrilité de la part du chef de l’Etat. Valérie Pécresse a rencontré Nicolas Sarkozy, dont le soutien se fait attendre. Il ne sera pas présent à son meeting.
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Drôle de semaine pour Valérie Pécresse. Alors que la candidate LR s’apprête à faire son grand meeting de campagne, dimanche, au Zénith de Paris, les ralliements d’élus de droite à Emmanuel Macron se sont enchaînés. A commencer par Eric Woerth, ancien ministre de Nicolas Sarkozy et président LR de la commission des finances de l’Assemblée. La première d’une série de débauchages : Catherine Vautrin, ancienne ministre et présidente de la communauté urbaine du Grand Reims, puis ce vendredi Natacha Bouchart, maire LR de Calais, et Nora Berra, ancienne secrétaire d’Etat… sarkozyste.

Sans parler de l’attaque à la sulfateuse de Rachida Dati contre le directeur de campagne de Valérie Pécresse, Patrick Stefanini, « un looser ». L’escadrille d’emmerdes est en formation. Et ce n’est peut-être pas fini. Le Parisien évoque des « discussions » entre Macron et l’ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin, la navigatrice Maud Fontenoy, autre soutien passé de Nicolas Sarkozy, ou encore l’ancienne ministre Brigitte Girardin.

Dati a sorti « la mitrailleuse lourde »

Si ce genre de prises de guerre ne font pas l’élection, elles créent néanmoins un climat. Les soutiens de Valérie Pécresse, eux, minimisent. « Ce sont des débauchages individuels d’élus qui sont souvent en fin de carrière ou qui avaient mis de côté leur carte de LR depuis 2017, comme Nora Berra. C’est une mise en scène, pour ne pas dire un recyclage », soutient le député LR Robin Reda, un fidèle de Valérie Pécresse. « Plus personne ne sait qui est Nora Berra », tacle le sénateur LR de l’Oise, Jérôme Bascher. Concernant les critiques de Rachida Dati, il reconnaît que la maire du VIIe arrondissement de Paris a sorti « la mitrailleuse lourde », en ayant « des mots outranciers, exagérés ». « Elle ne change pas… » ne peut-il que constater.

Lire aussi : « C’est l’ancien monde mais en pire » : quand Éric Woerth tirait à boulets rouges sur Emmanuel Macron et le gouvernement

Concernant Natacha Bouchard, « ce n’est pas une surprise » pour le sénateur LR du Pas-de-Calais, Jean-François Rapin, qui la connaît bien. Il lui a succédé au Sénat. « Je voyais le coup arriver, car elle n’avait soutenu personne lors du congrès », note le président de la commission des affaires européennes de la Haute assemblée. Une décision qui interroge en vue des législatives dans le Calaisis. La 6e circonscription du Pas-de-Calais avait été remportée par la ministre déléguée à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, face notamment à Faustine Maliar, candidate LR proche de Natacha Bouchart. Le grand écart risque d’être compliqué en juin prochain pour la maire de Calais.

« A cet instant, ça n’aurait pas de sens que Nicolas Sarkozy rentre dans le jeu »

Alors que la campagne de Valérie Pécresse semble patiner, les regards se tournent vers Nicolas Sarkozy. L’ancien chef de l’Etat n’a toujours pas exprimé son soutien. Et ça commence à se voir. Selon Le Canard Enchaîné, Nicolas Sarkozy n’a pas de mots tendres, devant ses visiteurs. « On ne peut pas dire qu’elle vend du rêve. […] Elle a de la quille, mais pas beaucoup de voilure », rapporte l’hebdomadaire. Faute de mieux, à deux jours d’un meeting « clef », la candidate s’est entretenue avec l’ancien Président, dans ses locaux rue de Miromesnil, à Paris. « Une conversation entre amis, une conversation franche et affectueuse. C’était très utile », a seulement lâché à la sortie Valérie Pécresse. Pour le soutien, on repassera.

Une rencontre qui n’a rien à voir avec le flottement des derniers jours, assure l’entourage de Nicolas Sarkozy à publicsenat.fr. « Elle avait sollicité ce rendez-vous il y a plusieurs jours. Ce n’est pas la conséquence du bruit de ces derniers temps », assure-t-on. « Nicolas Sarkozy était content de ce moment ». Mais pas encore de soutien ? « Le moment viendra, quand la campagne sera plus engagée », dit-on, « à cet instant, ça n’aurait pas de sens que Nicolas Sarkozy rentre dans le jeu. Ce n’est pas sûr que ce soit judicieux » de « dégainer » maintenant. Soit. En conséquence, l’ex-chef de l’Etat « ne sera pas présent, dimanche, au meeting ». Nicolas Sarkozy, qui s’y connaît en grand rassemblement de campagne, a « sûrement donné quelques petits conseils pour gérer »… C’est trop aimable. Alors que tous les cadors de la droite ont apporté leur soutien, Nicolas Sarkozy a choisi de se faire encore quelque peu désirer.

Robin Reda, lui, « n’imagine pas une seule seconde que Nicolas Sarkozy puisse faire un autre choix que celui de la candidate de sa famille politique. Ce ne serait pas compris par nos sympathisants ». Le pire des scénarios serait un soutien à Emmanuel Macron. Les deux hommes ont entretenu de bonnes relations depuis 5 ans. « Comme on dit dans le métier, Macron le traite bien… » note une parlementaire LR.

« Dans une campagne, il y a toujours des moments compliqués, où on a des doutes »

Reste que cette semaine marquée par les débauchages complique les affaires de Valérie Pécresse. On fait mieux comme rampe de lancement avant un Zénith. « Le Président débauche opportunément quelques élus de droite pour faire un peu le buzz avant notre meeting », pointe Robin Reda. « C’est le timing de Monsieur Macron. Il a mis en œuvre une stratégie pour mettre dans l’embarras Valérie Pécresse. Il la déroule. Elle, de son côté, déroule sa campagne avec son timing. Nicolas Sarkozy avait dit d’elle que c’était un diesel », souligne la sénatrice LR Sophie Primas, l’une de ses conseillères politiques pour la campagne.

« On préférerait être dans une dynamique plus positive depuis deux/trois semaines », reconnaît la présidente LR de la commission des affaires économiques du Sénat, « mais dans une campagne, il y a toujours des moments compliqués, où on a des doutes ». « On s’attendait à ce faux plat » dit son collègue du Pas-de-Calais.

« Aller chercher quelques soutiens dans le camp Pécresse, c’est une preuve de peur »

Mais les soutiens de la candidate voient en creux un signe de fébrilité du camp Macron. « Macron veut affaiblir Pécresse car il sait que le sujet, c’est un second tour face à elle. C’est une inquiétude. Pécresse leur pose un vrai problème. Le sujet, c’est comment l’affaiblir », analyse Sophie Primas. Ce que confirme Jean-François Rapin : « Avant le meeting, il faut absolument casser la dynamique. Aller chercher quelques soutiens dans le camp Pécresse, c’est une preuve de peur ».

Du côté de La République En Marche, sous couvert d’anonymat, on reconnaît que le principal danger vient de la droite. « C’est inutile de concentrer nos efforts sur Zemmour/Le Pen. On n’a qu’un adversaire possible, c’est Pécresse. C’est la seule », confie un responsable de la majorité présidentielle, qui ajoute :

Il ne faut pas le dire, sinon ça va la faire monter. Mais il faut se préparer à ce que ce soit elle, ne penser qu’à elle. (un responsable de la majorité présidentielle)

La difficulté pour la candidate LR, au coude à coude avec l’extrême droite, est d’être au second tour. « Dans ce cas, on peut l’emporter sur le thème que les électeurs de droite préféreront l’original à la copie. Et grâce aux gens qui détestent Macron », pense Jérôme Bascher.

« Moment de révélation »

Pour l’heure, l’enjeu du meeting sera pour Valérie Pécresse d’avoir « un moment de révélation », dit Robin Reda et de « mettre en récit » ses mesures. « Ce sera une nouvelle étape qui la propulsera à un autre niveau », espère Sophie Primas. « Elle doit se singulariser », ajoute Jean-François Rapin. « On a vraiment besoin de rentrer dans la campagne », dit Jérôme Bascher, qui ajoute :

On est dans une drôle de campagne, comme il y a eu une drôle de guerre. Chacun est sur ses positions, les sondages sont figés. Puis il y aura une blitz campagne et il peut se passer beaucoup de choses.

« La vraie campagne, ce sera au mois de mars, où vont se cristalliser les enjeux auprès des Français », dit un membre de l’équipe Pécresse, alors qu’on disait la même chose de janvier, puis de février… Attention quand même à ne pas trop attendre, quitte à rester à l’état liquide ou gazeux.

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