Présidentielle : autour de Valérie Pécresse, la droite affiche son unité

Présidentielle : autour de Valérie Pécresse, la droite affiche son unité

L’heure est au rassemblement chez les Républicains, après la très large victoire de Valérie Pécresse samedi, qui portera les couleurs du parti pour 2022. Un double défi se pose désormais pour la candidate d’un parti étouffé entre l’extrême droite et le macronisme : parvenir à faire la paix avec la famille centriste, et éviter une fuite des militants déçus vers Éric Zemmour.
Romain David

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« Je n’ai pas souvenir d’avoir vu ça depuis Sarko », commente un salarié des Républicains face à l’arrivée triomphale de Valérie Pécresse, samedi peu avant 14 heures, au siège des Républicains. Le vote du second tour du Congrès LR n’est pas encore tout à fait clos qu’une centaine de militants et de journalistes se pressent autour de la présidente de l’Île-de-France. Dans le hall éclatant de ce grand bâtiment du 15e arrondissement de Paris, la bousculade autour de la candidate manque presque de virer à la foire d’empoigne. Quelques minutes plus tard, Christian Jacob, le patron du parti, lève le faux suspense : Valérie Pécresse sera bel et bien la candidate investie pour la présidentielle, après sa très large victoire (61 %) sur le député des Alpes-Maritimes Éric Ciotti (39,05 %). Au regard des ralliements qu’elle avait reçus, il n’y avait guère de mystère quant à l’issue du scrutin. « Pour la première fois de son histoire, notre famille politique va se doter d’une femme à l’élection présidentielle », salue la candidate, qui promet de « tout donner, [sa] force, [son] énergie, pour faire triompher les convictions de la droite ».

Sur le podium de la salle des conférences de LR, les candidats malheureux posent aux côtés de Valérie Pécresse, mais aussi les ténors du parti : Christian Jacob, sa vice-présidente Annie Genevard, le président du Sénat Gérard Larcher, ou encore le chef de file des députés LR, Damien Abad. L’heure est au rassemblement après une campagne éclair, où beaucoup ont craint de voir le scénario de 2016 se reproduire, d’autant que le duel Éric Ciotti - Valérie Pécresse marque la concurrence de deux droites, la première, dure, identitaire et décomplexée, la seconde plus libérale, ouverte vers le centre, malgré un positionnement assez radical de la part de Valérie Pécresse sur les questions d’immigration, de sécurité et de justice.

Jeudi, Éric Ciotti a été le premier à sonner le rassemblement, comme pour balayer les interrogations qu’il a pu soulever en assumant une proximité idéologique avec Éric Zemmour : « Valérie a désormais l’immense responsabilité d’amener notre famille vers la victoire, je veux la féliciter avec amitié et affection », a-t-il salué. Avant d’ajouter : « Je veux que nous conduisions ensemble ce grand combat, que nous conduisions ensemble cette campagne avec les amis qui nous entourent. »

« Il y avait ici ou là des différences, mais pas si fondamentales »

Dans la salle, la clarté du score s’accompagne de soupirs de soulagement. « C’est le meilleur résultat que l’on pouvait espérer : il n’est pas humiliant pour Éric Ciotti, car cela aurait créé des divisions, des scissions, et il est suffisamment large pour que Valérie Pécresse s’impose d’elle-même », relève auprès de Public Sénat le sénateur des Hauts-de-Seine Roger Karoutchi. « Cela permet de lancer une campagne dans l’unité et le rassemblement. » La sénatrice Alexandra Borchio-Fontimp, directrice de campagne d’Éric Ciotti, souligne que le premier déplacement de campagne se fera à Saint-Martin-Vésubie, « le village d’enfance d’Éric Ciotti », un gage d’unité selon elle. Mais il aurait été difficile pour Valérie Pécresse de faire autrement : « Éric était seul au second tour, et il fait près de 40 % des suffrages sur son nom », veut rappeler Alexandra Borchio-Fontimp. « Il est celui qui a le plus rassemblé. »

Karoutchi sur la victoire de Pécresse : "C’est le meilleur résultat que l’on pouvait espérer"
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"Eric Ciotti fait près de 40 % des suffrages sur son seul nom"
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Désormais, il va falloir amalgamer les programmes et les équipes en vue de la campagne présidentielle. Là aussi, les uns et les autres imaginent mal que Valérie Pécresse et Éric Ciotti ne parviennent pas à s’entendre. « Les deux ont l’habitude de travailler ensemble », fait-on valoir. D’ailleurs, ne sont-ils pas tous les deux issus des rangs fillonistes ? « Il y avait ici ou là des différences, mais pas si fondamentales qu’il eût fallu faire une négociation de compromis. Peut-être y aura-t-il un discours plus affirmé sur certaines valeurs », note Roger Karoutchi. « On fera attention aux équilibres, dans les territoires et aux législatives, un rassemblement ne doit pas être que des paroles, mais aussi des actes », assure la sénatrice Sophie Primas, soutien de Valérie Pécresse.

Elargir vers le centre, « sans s’affadir »

« Se réunir ? Mais c’est déjà fait ! », balaye le président du Sénat Gérard Larcher lorsque Public Sénat l’interroge. Lui, anticipe déjà le coup d’après : « Maintenant, il faut se rassembler avec la famille du centre. L’aspect politique est là », pointe-t-il. Une famille centriste qui a peu goûté son exclusion de ce congrès, réservé aux seuls militants LR. Fin septembre, Jean-Luc Lagarde, le président de l’UDI, avait même menacé d’investir son propre candidat pour la présidentielle. L’élection de Valérie Pécresse, plus proche du centre que le très droitier Éric Ciotti, devrait faciliter les tractations.

Gérard Larcher : "La campagne a donné une très belle image de notre famille politique"
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« Valérie a porté un projet qui est celui d’une ligne de droite qui s’assume, qui ne s’excuse pas. On doit continuer à le porter, sans l’affadir », avertit Bruno Retailleau, qui n’a pas officiellement pris position dans cette campagne, mais à qui Éric Ciotti promettait un « grand ministère de la sécurité intérieure ». « La ligne de droite, il faut la garder. On a trop souvent déçu par le passé nos propres électeurs », insiste-t-il. D’ailleurs, il ne cache pas sa méfiance face aux accords de partis : « On ne rassemble pas par le haut, mais par le bas. On ne rassemble pas les appareils, on rassemble les électeurs », martèle le patron de la droite sénatoriale.

Retailleau : "La ligne de droite, il faut la garder. On a trop souvent déçu nos propres électeurs"
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Éric Zemmour en embuscade

D’autant qu’un élargissement vers le centre pourrait échauder une partie des 44 412 adhérents qui ont soutenu Éric Ciotti au second tour, et les pousser dans les bras de Marine Le Pen ou d’Éric Zemmour, qui a officialisé sa candidature à la veille du congrès LR. D’ailleurs, le tweet de félicitation que le polémiste a adressé au Niçois après sa qualification pour le second tour, jeudi - « Heureux, cher Éric, de voir nos idées si largement partagées par les militants LR » - avait tout d’un premier appel du pied. Ce samedi, il est allé plus loin avec une lettre ouverte spécifiquement adressée aux sympathisants d’Éric Ciotti et postée sur les réseaux sociaux : « Nous pouvons faire ensemble des choses inoubliables. Nous allons les faire. Vous pouvez compter sur moi et je sais que c’est réciproque. Je vous attends, demain, bientôt », écrit-il. En milieu de journée, quelques soutiens du polémiste avaient pris position en face du siège des Républicains. Avec eux plusieurs exemplaires de son dernier livre La France n’a pas dit son dernier mot sur un grand portant, et le message suivant : « Montre ta carte des Républicains et reçois gratuitement un exemplaire ».

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