Dans la nuit du 20 au 21 janvier, les sénateurs ont adopté un article du budget 2025, un peu passé sous les radars, prévoyant une réforme du chèque énergie. Ce dispositif, créé en 2018 pour faire face à la hausse des prix de l’énergie, permet aux ménages les plus modestes de bénéficier d’une aide – entre 50 et 277 euros par an – pour payer leurs factures.
En apparence technique, la réforme votée par les sénateurs a suscité les débats. Elle modifie en effet les modalités de versement du chèque. Jusqu’à présent, les ménages éligibles étaient identifiés automatiquement par un croisement de leur revenu fiscal et de leur taxe d’habitation. Avec la suppression de cette dernière, ces données ne peuvent plus être utilisées pour envoyer le chèque, sans besoin d’en faire la demande, aux près de 6 millions de foyers qui peuvent en bénéficier.
Une réforme qui préserve l’automaticité du versement
Initialement, le gouvernement prévoyait de vérifier l’éligibilité des ménages au chèque énergie en croisant leur revenu fiscal avec leur numéro de compteur électrique. Une méthode qui demandait à tous les nouveaux bénéficiaires de formuler une demande sur une plateforme ou par courrier pour toucher le chèque, au risque d’accroître les non-recours. Au Sénat, le dispositif a donc été vivement est critiqué, aussi bien sur les bancs de la gauche que par la commission des affaires économiques. « Ce sont encore une fois les plus précaires qui seront en difficulté », a dénoncé le sénateur communiste Jean-Pierre Corbizet.
Face à la montée des critiques sur cette réforme, le gouvernement a décidé de l’améliorer en séance, en déposant un amendement permettant de conserver l’automaticité du versement du chèque énergie. Pour identifier les bénéficiaires, l’Etat croisera désormais les données fiscales avec la liste des points de livraison d’électricité, établie par les gestionnaires du réseau électrique. « C’est un progrès en termes de simplicité et de protection des près de 6 millions de ménages bénéficiaires », a salué le ministre de l’Energie Marc Ferracci.
Le dispositif amputé de 180 millions d’euros
Au-delà de cette réforme contestée, le budget alloué au chèque énergie pour 2025 est également en baisse. Sur le plateau de BFMTV ce 15 janvier, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin préparait déjà les esprits à une « réduction de la voilure », en raison de la baisse des tarifs réglementés de l’électricité attendue en février prochain. Concrètement, dans sa copie, le gouvernement prévoit une diminution de 180 millions d’euros des crédits alloués au dispositif, par rapport à 2024.
Une nouvelle coupe budgétaire qui suscite la colère des sénateurs de gauche, réclamant dans plusieurs amendements le rétablissement du budget de l’an passé, à hauteur de 900 millions d’euros. « La réforme du gouvernement se traduit par la réalisation d’économies sur le dos des ménages en situation de précarité énergétique, du fait de l’accroissement du taux de non-recours », a dénoncé le sénateur socialiste Franck Montaugé. De son côté, Yannick Jadot a défendu un amendement prévoyant de relever le plafond d’éligibilité au chèque énergie au niveau du SMIC. « Le plafond actuel est bien trop bas, il ne permet pas de toucher toutes les personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, ou les personnes au-dessus du plafond mais qui vivent dans des passoires thermiques », a observé le sénateur écologiste.
Pour le ministre de l’Energie, toute hausse des crédits pour le chèque énergie ne pourra être discutée qu’ « au moment où nous aurons du recul sur la réforme qui va être mise en œuvre cette année ». Dans un contexte budgétaire contraint, la mesure n’a pas non plus reçu le soutien de la commission des finances. Pour la rapporteure spéciale Christine Lavarde, c’est l’ensemble de la politique d’aide de l’Etat en faveur des foyers en situation de précarité énergétique qu’il faudrait revoir. « Il faudrait accroître nos moyens vers ce qui a un impact à long terme, c’est-à-dire une vraie rénovation de l’enveloppe thermique des bâtiments, plutôt que de donner des chèques pour diminuer le coût de la facture », a estimé la sénatrice Les Républicains.