Meeting du NFP à Blois : la direction du PS affiche une image d’unité
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Blois, jour deux. Si la journée d’hier était marquée par les tensions internes au parti socialiste, celle d’aujourd’hui est fortement teintée du sceau du Nouveau Front populaire. Et pour cause : un meeting de dernière minute a été organisé à Blois, en présence de Lucie Castets, Marine Tondelier, Éric Coquerel et Léon Deffontaines. Etaient présents dans la foule Clémentine Autain, Raquel Garrido et Alexis Corbière.
Ce grand raout permet à la candidate malheureuse à Matignon d’affirmer sa détermination à devenir cheffe du gouvernement et de rassurer les militants sur l’état du Nouveau Front populaire. « Le NFP est uni, et reste uni. Je ne me sens pas du tout moins soutenue qu’avant et les militants appellent tous à l’unité », a-t-elle déclaré dès son arrivée à Blois.
Un meeting du NFP organisé à Blois, au grand dam de la ligne anti-Faure
Mais l’organisation de ce meeting n’a pas plu à tout le monde. En effet, les deux textes d’orientation opposés à la ligne d’Olivier Faure, ceux d’Hélène Geoffroy et de Nicolas Mayer-Rossignol, ont vu d’un mauvais œil cet événement. « Ce meeting est quand même décalé par rapport à la tradition d’une université d’été », s’émeut un soutien au maire de Rouen. Une contre-conférence de presse a été organisée, une heure après la venue prévue de Lucie Castets, à quelques mètres du lieu du meeting. Tous les soutiens aux dissidents ont pris la parole, y compris Karim Bouamrane, le maire de Saint-Ouen, dont le nom circule pour Matignon. Il a prononcé un discours de candidat, en commençant comme dans un meeting : « Nous sommes socialistes, nous sommes membres du NFP, nous sommes de gauche ». Il a appelé à ce que le PS reprenne le leadership à gauche, tout en appelant à la fin du « tactico-tactique ».
« Le NFP, je m’en fiche »
Ce campus de Blois prend des allures de mini-congrès, réclamé à cor et à cri par la ligne contestataire, qui se prévaut de peser 51 % des militants. « Pas de sang sur les murs » lors de ces débats internes, disait Olivier Faure ce matin devant la presse, certes, mais de profonds désaccords stratégiques. La ligne Geoffroy-Mayer-Rossignol veut une coupure nette avec la France Insoumise, et partant, l’éloignement du NFP. Ils accusent le premier secrétaire de s’être soumis à Jean-Luc Mélenchon et souhaitent « reprendre leur autonomie ». Si en façade, chacun fait des efforts pour se montrer uni et ne pas critiquer ouvertement la stratégie du NFP, sous cape, les langues se délient, comme celle de cet élu socialiste tendance Mayer-Rossignol, qui murmure : « Le NFP, je m’en fiche ». L’enjeu derrière ce rejet du NFP et de la France Insoumise, c’est d’abord de mettre en difficulté Olivier Faure, dont ils décrient depuis 2022 la stratégie et l’accord de la NUPES, mais aussi de revendiquer un recentrage de la gauche au niveau du PS. A l’accord avec LFI, ils préfèrent un accord avec Place publique, le parti social-démocrate de Raphaël Glucksmann. Mais pèsent-ils assez pour mettre en danger la fragile alliance de gauche ?
« On ne peut pas chercher les bonnes grâces du NFP en juillet et chercher les bonnes grâces du président en septembre »
La direction du PS, elle, défend avec conviction sa ligne, tout en restant prudente sur la France Insoumise. « Sans le NFP, nous ne serions pas là », reconnaît un élu socialiste de la tendance d’Olivier Faure. Jérôme Durain, sénateur socialiste de la Saône-et-Loire, défend l’accord : « La difficulté c’est qu’on ne peut pas sauter d’un cheval à l’autre n’importe comment une semaine et la suivante. On a fait un programme dont nous pensions tous qu’il était nécessaire pour le pays. On va dire quoi aux gens ? Qu’on renonce à ce programme ? Il faut rester sur ce projet-là et cette alliance-là, car quelle est l’alternative ? D’aller travailler avec Emmanuel Macron ? Ça n’est pas envisageable ». Un avis partagé par le premier secrétaire. « On ne peut pas chercher les bonnes grâces du NFP en juillet et chercher les bonnes grâces du président en septembre », a-t-il affirmé ce matin. Olivier Faure revendique quelque 3 000 nouveaux adhérents depuis la dissolution. « Je ne pense pas qu’ils soient venus pour mettre fin au NFP », raille-t-il.
Pour autant, la direction du PS, comme ses concurrents en interne, se sent revigorée par l’amélioration récente des scores du parti. Elle aussi verrait bien un rééquilibrage de la gauche en leur faveur, d’autant que les rapports avec la France Insoumise peuvent être houleux. « Personne n’est soumis à personne », a martelé Olivier Faure, « numériquement, le groupe socialiste est à quasi-équivalence à l’Assemblée nationale avec le groupe insoumis. Nous avons un groupe au Sénat, plus de députés qu’eux au Parlement européen. Jean-Luc Mélenchon n’est pas devenu le candidat du NFP pour Matignon ».
Les remous internes au PS n’effraient pas leurs partenaires du NFP
Présents pour participer aux débats lors de ces universités d’été, les partenaires des socialistes, les écologistes, communistes et insoumis, ne s’inquiètent pas outre mesure des débats internes aux socialistes. « Je me garderais bien de m’immiscer dans les débats internes du PS », répond, prudent, le sénateur communiste Ian Brossat, « c’est un parti démocratique, il y a donc des différences internes qui s’expriment. Mais je suis convaincu qu’on a besoin du NFP pour poursuivre ce travail, parce que la fin de l’histoire n’est pas écrite et parce que la menace de l’extrême-droite est présente ».
Du côté des Insoumis, pourtant fortement mis en cause dans la querelle interne du parti à la rose, le discours est sensiblement le même. « Je regarde ce que dit la direction du mouvement et avec qui on discute, et sur cela, il n’y a pas d’ambiguïté avec Olivier Faure », affirme Éric Coquerel, le président LFI de la commission des finances de l’Assemblée nationale. « Je fais miens les propos d’Olivier Faure », ajoute-t-il, « il n’y aura pas au NFP de béquille au macronisme. Mais je n’ai pas l’impression qu’il y ait tant que ça de gens au PS, même dans l’opposition à la direction, qui veuillent servir de béquille au macronisme ». « La gauche avait besoin de cet accord », défend le sénateur écologiste Ronan Dantec, « si on reste sur des logiques d’appareil, c’est peut-être l’erreur qui a été faite dans la séquence après le second tour ».
Avec le meeting de cet après-midi, la direction du PS affiche donc son soutien plein et entier à l’alliance du NFP, alors que Lucie Castets n’a pas été nommée à Matignon et qu’aucun nom n’a encore été donné par l’Elysée. Ce qu’il leur reste à faire, c’est ce que préconise Alexandre Dumas à la fin du Comte de Monte-Cristo : « attendre et espérer ».
Images de Jérôme Rabier et Audrey Vuetaz
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