Election 2024 Trump

Donald Trump élu président des Etats-Unis : les 7 enseignements d’un scrutin historique

Le candidat républicain à la présidence des Etats-Unis a recueilli le nombre nécessaire de grands électeurs pour assurer sa victoire, et opère ainsi un retour inédit à la Maison Blanche. Le parti conservateur pourrait également prendre la main sur le Congrès, ce qui laisserait une très large marge de manœuvre à Donald Trump.
Romain David

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Sa victoire dans le Wisconsin, annoncée en milieu de matinée heure française, est venue mettre fin au faux suspens qui s’était installé depuis plusieurs heures. Donald Trump a réussi son improbable retour au pouvoir : ce mercredi 6 novembre, le milliardaire a été réélu pour un second mandat à la tête des Etats-Unis, réunissant 277 grands électeurs contre 224 pour sa rivale, la candidate démocrate Kamala Harris, selon un décompte provisoire qui le place au-delà du seuil des 270 requis pour remporter la présidence.

Huit ans après sa première élection, et quatre ans après avoir quitté la Maison Blanche avec pertes et fracas, le Républicain, qui a échappé à deux tentatives d’assassinat, quatre inculpations et une condamnation au pénal, s’offre une très large victoire à rebours de la plupart des pronostics, qui annonçaient une élection sur le fil. Retour en 7 points sur ce séisme politique.

Du jamais vu, ou presque

Une première élection, puis une défaite, et un retour. Le nom de Donald Trump apparaîtra désormais deux fois dans la liste des 47 chefs d’Etats américains, un « come-back » quasi-inédit dans l’histoire des Etats-Unis. Avant lui, un seul président avait réussi à effectuer deux mandats non consécutifs : le démocrate Clever Groveland, élu une première fois en 1885, défait quatre ans plus tard par le républicain Benjamin Harrison, puis réélu en 1893.

Donald Trump est en revanche le plus vieux candidat à remporter la course à la Maison Blanche, âgé de 78 ans et 146 jours. Il bat de quelques mois le record détenu par Joe Biden, 78 ans et 61 jours lors de sa victoire en 2020.

Une vague rouge

Bizarrerie du scrutin américain, liée au système des grands électeurs, le candidat élu n’est pas toujours celui qui a glané le plus grand nombre de voix lors du vote populaire. En effet, le principe du « winner takes it all » (le gagnant rafle la mise), en application dans 48 des 50 Etats américains, veut que le candidat arrivé en tête dans un Etat récupère le vote de l’ensemble des grands électeurs affiliés, quel que soit le score réalisé par son adversaire.

Ainsi, lors de sa première élection, en 2016, Donald Trump n’avait glané que 46,09 % des suffrages, contre 48,18 % des votes pour sa rivale Hillary Clinton. En revanche, le magnat de l’immobilier disposait du soutien de 304 grands électeurs, et l’ancienne secrétaire d’Etat de seulement 227. Cette année en revanche, les résultats diffusés à l’heure où nous écrivons par The Associated Press, principale agence de presse américaine, indiquent que le milliardaire a également bénéficié d’un véritable plébiscite populaire, avec 51 % des bulletins, soit 70,7 millions de voix.

Là aussi, Donald Trump réalise un exploit pour son camp : il faut remonter à 2004 et la réélection de George W. Bush pour trouver un autre Républicain ayant remporté le vote populaire. Et avant lui à son père, George H. W. Bush… en 1988. Cette situation trahit l’ampleur de la vague républicaine qui a déferlé sur la première puissance économique mondiale cette nuit.

Les principaux leviers du pouvoir aux mains des Républicains

Les 244 millions d’électeurs américains appelés aux urnes mardi ne se prononçaient pas seulement pour le futur locataire de la Maison Blanche, mais aussi sur la composition du Sénat, renouvelé par tiers tous les deux ans, et sur la totalité des 435 sièges de la Chambre des représentants, les deux organes législatifs qui forment le Congrès américain. Selon les territoires, les citoyens étaient également appelés à s’exprimer dans de nombreuses autres élections locales : gouverneurs, procureurs généraux, maires, etc.

En glanant deux sièges au Sénat, l’un en Virginie Occidentale et l’autre dans l’Ohio, les Républicains ont récupéré d’une très courte majorité le contrôle sur la Chambre haute du Congrès. Il pourrait aussi conserver la main sur la Chambre des représentants, dont on ne connaît pas encore la nouvelle composition. Se faisant, Donald Trump aurait les coudées franches pour dérouler son programme politique.

Rappelons que la Cour suprême, organe clef du pouvoir judiciaire aux Etats-Unis, est aussi dominée par les conservateurs, précisément grâce aux trois nominations de juges qu’a pu effectuer Donald Trump lors de son premier mandat, les membres de la Cour siégeant à vie.

Les marchés boursiers bondissent

En marge de l’annonce de la victoire de Donald Trump, les trois principaux indices boursiers de Wall Street ont marqué une nette hausse mercredi : + 2,99 % pour le Dow Jones, + 1,49 % pour le Nasdaq et + 2,12 % pour le S & P 500. À noter : l’action du groupe Tesla, propriété d’Elon Musk, s’est envolée de près de 13 %.

Le milliardaire n’a pas hésité à mettre la main au portefeuille pour soutenir la candidature de Donald Trump, allant jusqu’à organiser une pseudo-loterie à un million de dollars par jour dans les Etats clefs. Elon Musk fait partie des quelques personnes que le républicain a tenu à remercier lors de sa première prise de parole après sa victoire : « C’est un personnage, c’est un génie, il est spécial », a-t-il déclaré.

Une élection très genrée

Les sondages de sortie des urnes confirment un phénomène anticipé depuis de longues semaines par les commentateurs : la forte polarisation homme/femme dans la répartition des voix. Le discours viriliste et conservateur du milliardaire a recueilli un large succès auprès du public masculin. À rebours, la ligne progressiste de Kamala Harris, avec une campagne largement accès sur la question de l’avortement, a davantage séduit les femmes.

Selon un pointage réalisé par le journal Le Monde, sur la base des enquêtes d’opinion diffusées dans les médias américains : 54 % des électrices ont voté pour Kamala Harris. De son côté, Donald Trump réalise un score identique auprès des hommes. Cette opposition est encore plus marquée chez certaines catégories sociales, même lorsque celles-ci sont traditionnellement acquises aux démocrates. Ainsi, au sein de la communauté hispanique, 61 % des femmes ont voté pour Kamala Harris, mais seulement 45 % des hommes ont soutenu la démocrate, selon un sondage publié par la chaîne NBC News. C’est la première fois que les électeurs masculins d’origine hispanique ne soutiennent pas majoritairement le candidat du camp démocrate à une élection présidentielle.

Donald Trump aspire une partie du vote latino

La forte poussée électorale réalisée par Donald Trump, avec un score bien meilleur qu’en 2016, s’explique en partie par ses performances auprès de catégories de population généralement plus sensibles aux idées du camp adverse. Toujours selon l’enquête de sortie des urnes réalisée par NBC News, seuls 5 % des électeurs de Joe Biden en 2020 ont choisi Trump en 2024. Néanmoins, ce chiffre est nettement plus élevé chez certaines minorités issues de l’immigration. Ainsi, 11 % des électeurs hispaniques et 10 % des Américains d’origine asiatique sont passés du camp démocrate au camp républicain lors de cette élection.

De ce point de vue, le vote hispanique pourrait avoir été déterminant. En Pennsylvanie notamment, l’un des Etats clefs qui a basculé dans le rouge mardi, le magnat de l’immobilier a rassemblé 42 % des électeurs latinos, quand ils n’étaient que 27 % à l’avoir soutenu en 2020. Vraisemblablement, ses propos sur l’immigration ou sur Porto Rico, qualifié « d’île flottante d’ordures » en fin de campagne, ne semblent pas avoir eu d’effet négatif sur ces électeurs. En face, Kamala Harris pourrait avoir pâti du bilan de Joe Biden auprès des classes populaires, voire d’un plafond de verre sur la question du genre.

L’Europe, l’autre perdante de la victoire de Donald Trump

Emmanuel Macron a été l’un des premiers chefs d’Etat étrangers à féliciter Donald Trump pour sa réélection. Une forme d’usage diplomatique : la France, qui a activement participé à l’indépendance des Etats-Unis à la fin du XVIIIe siècle, se targue régulièrement d’être le plus vieil allié de l’oncle Sam. On se souvient qu’en 2017, Emmanuel Macron avait invité Donald Trump à assister aux festivités du 14 juillet. Sur le réseau social X, le locataire de l’Elysée se dit « prêt à travailler » avec son homologue, malgré des relations qui se sont rapidement détériorées au cours du premier mandat.

Dans la foulée, le président français a aussi indiqué avoir échangé avec le chancelier allemand Olaf Scholz. « Nous allons œuvrer pour une Europe plus unie, plus forte, plus souveraine dans ce nouveau contexte », écrit-il. Désormais, de nombreux responsables politiques appellent à un « sursaut européen ». Les ambitions protectionnistes du nouveau locataire de la Maison Blanche, sa désinvolture face aux enjeux climatiques et environnementaux, mais aussi sa volonté de désengager les Etats-Unis de l’Otan et de négocier avec la Russie une paix rapide en Ukraine plongent aussi le vieux continent dans l’inconnu.

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