Italy G7
French President Emmanuel Macron chats with President of Algeria Abdelmadjid Tebboune, as they and other G7 heads of State pose for a family photo on day two of the 50th G7 summit at Borgo Egnazia, southern Italy, Friday, June 14, 2024. (Christopher Furlong/Pool Photo via AP)/BGK309/24166661195193/POOL PHOTO/2406142045

Tensions franco-algériennes : que disent les accords migratoires que veut remettre en cause Bruno Retailleau ?

Alors que les tensions s’intensifient entre la France et l’Algérie, notamment sur le dossier migratoire, Bruno Retailleau a annoncé le 17 mars suspendre l’accord de 2007 qui lie les deux pays. Avec l’accord conclu le 27 décembre 1968, ils sont dans le viseur de la droite depuis plusieurs années. Que contiennent ces textes ?
Rédaction Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

La France et l’Algérie s’enfoncent un peu plus dans la crise diplomatique. Hier, Alger a refusé la liste d’une soixantaine d’Algériens présents en France, que Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur, prévoyait d’expulser. Décision qui a provoqué la colère du locataire de la place Beauvau. Il promet au gouvernement algérien une « réponse graduée », en suspendant l’accord, signé en 2007. Ce n’est pas le seul accord dans le viseur de Bruno Retailleau. Depuis plusieurs années, il dénonce les accords migratoires passés entre Paris et Alger, particulièrement celui conclu en 1968.

L’accord de 1968 : un héritage des accords de paix entre l’Algérie et la France

L’accord du 27 décembre 1968, passé entre Jean Basdevent, haut représentant envoyé par de Gaulle en Algérie, et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères, est signé six ans après la fin de la guerre entre les deux pays.

Il prévoyait initialement des mesures pour faciliter l’installation des Algériens en France, ainsi que la venue éventuelle de leur famille. A l’époque, la France cherche de la main-d’œuvre. Le texte doit ainsi permettre de « faciliter la promotion professionnelle et sociale des travailleurs algériens ; d’améliorer leurs conditions de vie et de travail ; de favoriser le plein-emploi de ces travailleurs qui résident déjà en France ou qui s’y rendent par le canal de l’Office national de la main-d’œuvre, dans le cadre d’un contingent pluriannuel déterminé d’un commun accord ». En clair, les Algériens qui souhaitent s’installer en France avec leur famille pour travailler bénéficient d’une procédure différente des autres ressortissants étrangers, soumis, eux, au Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda).

Des dispositions dérogatoires au droit commun

Concrètement, les Algériens bénéficient de procédures dérogatoires dans plusieurs cas. Ils peuvent ainsi obtenir une carte de résident de dix ans, après trois ans passés sur le territoire, quand les autres ressortissants hors-UE doivent attendre cinq ans. En cas de regroupement familial, les membres de la famille reçoivent une carte de résident de la même durée que le titre de la personne qu’ils rejoignent. En outre, les Algériens peuvent s’installer à leur compte dans une activité libérale sans autre formalité.

Pour autant, cet accord ne bénéficie pas sur tous les plans aux Algériens. Ils sont en effet exclus des dispositifs tels que le passeport talents, ou encore la régularisation par le travail, prévue par la circulaire Valls.

Un accord amendé à trois reprises

Au cours des années, cet accord a été amendé à trois reprises : en 1985, 1994 et 2001. Ces trois modifications ont rapproché la situation des ressortissants algériens des dispositions de droit commun. Après l’amendement de 1985, les Algériens sont soumis à l’obtention d’un visa pour entrer sur le territoire français. Après celui de 1994, le certificat de résidence d’un ressortissant algérien périme si ce dernier passe plus de trois ans consécutifs hors du territoire français, disposition qui s’applique aussi dans le droit commun.

L’accord de 2007 : faciliter la circulation de détenteurs de passeports diplomatiques

L’accord passé le 10 juillet 2007 entre la France et l’Algérie, dans le viseur de Bruno Retailleau, concerne quant à lui les ressortissants français et algériens munis d’un passeport diplomatique. Ces derniers sont autorisés à entrer et à circuler sur le territoire de l’autre pays sans visa, dans une limite de 90 jours. Une facilité à laquelle le ministre de l’Intérieur vient de mettre fin, dans le cadre de sa « réponse graduée ». Bien qu’il ne soit pas en charge de la politique internationale de la France, les moyens dont dispose le ministre ne s’arrêtent pas là, et la « réponse graduée » n’en est qu’à ses débuts. Le locataire de Beauvau peut ainsi, s’il le décide, restreindre l’octroi de visas, renforcer le contrôle aux frontières ou encore supprimer les agréments des futurs consuls généraux algériens, détaille Le Figaro. Toute une panoplie de mesures dont, pour l’instant, aucune n’est certaine.

Partager cet article

Dans la même thématique

Tensions franco-algériennes : que disent les accords migratoires que veut remettre en cause Bruno Retailleau ?
4min

International

Chercheurs américains en Europe : « Une vaste comédie », selon cette eurodéputée insoumise  

L’Union européenne débloque 500 millions d’euros pour attirer les chercheurs américains maltraités par Donald Trump. Mais cette enveloppe est-elle suffisante ? L’Union a-t-elle les moyens d’accueillir des chercheurs américains alors que sa propre recherche manque de financements ? On en débat cette semaine dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat.

Le

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?
7min

International

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?

Les bombardements israéliens sur une série de sites iraniens durant la nuit écoulée viennent questionner l’état de la relation entre Washington et l’État hébreu, qui ont connu une série de hauts et de bas lors des derniers mois. Ce vendredi, Donald Trump a choisi de mettre la pression sur Téhéran.

Le

Pakistan Iran Mideast Wars
5min

International

Frappes israéliennes : « Israël veut replacer l’Iran comme l’ennemi principal de la région »

Cette nuit, Israël a frappé à de nombreuses reprises des sites nucléaires et des dirigeants de l'armée iranienne en justifiant une « menace nucléaire ». L’Iran a riposté avec une centaine de drones lancés vers le territoire israélien. Les attaques se sont poursuivies dans la journée. Pour Bernard Hourcade, directeur de recherche émérite au CNRS et spécialiste de l’Iran, la justification d’Israël n’est qu’une « façade » et vise à occulter la question palestinienne. Selon lui, cette série d'attaques va renforcer l’isolement d’Israël. Entretien.

Le

Iran nuclear water reactor of Arak
6min

International

Attaques d'Israël contre l'Iran : ce que l'on sait du programme nucléaire de Téhéran

Israël a invoqué la menace nucléaire pour justifier une série d’importants bombardements sur le sol iranien. Accusée de ne plus respecter depuis plusieurs années l’accord conclu en 2015 sur ses capacités nucléaires, Téhéran disposerait désormais du matériel nécessaire à la construction d’une bombe, selon des conclusions de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

Le

La sélection de la rédaction

Banque d’images du Sénat – Wlad Simitch Capa Pictures
3min

Politique

Immigration : une mission du Sénat propose de dénoncer l’accord franco-algérien de 1968, les socialistes claquent la porte

Une mission d’information du Sénat, pilotée par la majorité de droite et du centre, propose de dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. La sénatrice PS Corinne Narassiguin en a tiré les conséquences en décidant de quitter cette mission qu’elle qualifie « d’outil créé de toutes pièces pour valider la campagne de Bruno Retailleau ».

Le

Tensions franco-algériennes : que disent les accords migratoires que veut remettre en cause Bruno Retailleau ?
6min

International

Immigration : le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau « favorable à la dénonciation de l’accord franco-algérien de 1968 »

Auditionné par le Sénat ce mercredi 27 novembre, le locataire de la place Beauvau a tiré à boulets rouges sur cet accord bilatéral et le statut particulier qu’il accorde aux ressortissants algériens qui arrivent en France. Favorable à son abrogation au vu de la dégradation des relations franco-algériennes, Bruno Retailleau précise toutefois que cette position n’engage pas le gouvernement.

Le

Tensions franco-algériennes : que disent les accords migratoires que veut remettre en cause Bruno Retailleau ?
3min

International

Tensions France-Algérie : « Depuis l’indépendance, l’Algérie n’a que la haine de la France à offrir à son peuple », dénonce Jean-Philippe Tanguy (RN)

Invité de la matinale de Public Sénat, Jean-Philippe Tanguy (RN) a dénoncé l’attitude de l’Algérie, qui a refusé d’accueillir une soixantaine de ressortissants expulsés par la France. Le député RN estime qu’Emmanuel Macron s’est mis “dans la main du régime algérien” depuis 2017 et ses propos sur la colonisation

Le