Accord Ciotti-RN : « Une victoire avec une majorité absolue pour l’extrême-droite devient parfaitement crédible », alerte Olivier Faure
Après l’annonce faite en loup solitaire par Éric Ciotti d’alliance entre LR et le RN, le monde politique français est sous le choc. A gauche, la nécessité de s’unir pour éviter une majorité absolue à l’extrême-droite se fait plus pressante. Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, est venu au Sénat cet après-midi présenter l’avancement des négociations entre les partis de gauche visant à la constitution d’un « front populaire ». Il appelle à la « mise au placard » des « rancœurs » dans son camp.
L’annonce a fait l’effet d’un coup de tonnerre. Éric Ciotti, patron des Républicains, a annoncé ce midi sur le plateau de TF1 une « alliance » avec le RN pour les législatives à venir. Dans son camp, cela n’est pas du tout passé : plusieurs démissions du parti ont eu lieu depuis, Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, a dénoncé une « double faute » de la part du niçois.
A gauche aussi, l’annonce a fait un choc. « Avec le ralliement de LR d’Éric Ciotti au RN, après le ralliement de la nièce de Marine Le Pen, on est dans la situation où l’hypothèse d’une victoire avec une majorité absolue pour l’extrême droite devient parfaitement crédible », s’est inquiété Olivier Faure au micro de Public Sénat. Le premier secrétaire du Parti Socialiste était venu devant ses troupes au Sénat, présenter les avancements des négociations qui ont été enclenchées hier soir entre les partis de gauche, en vue de la constitution d’un nouveau « front populaire ».
« Nos rancœurs […] nécessitent d’être mises au placard »
Alors que l’ombre d’une victoire de l’extrême droite se précise, la gauche sera-t-elle incitée à accélérer dans son union ? Depuis hier soir, et l’appel par le Parti socialiste, les Ecologistes, les Insoumis, le Parti communiste, Place publique, Générations et la Gauche républicaine et socialiste, à constituer un nouveau front populaire, les flux et les reflux fuitent de part et d’autre. En 2022, au moment de constituer la Nupes, une partie du PS s’était fortement opposée à l’accord.
Pour le premier secrétaire du PS, la ligne est claire : la situation « justifie qu’on s’y mette toutes et tous et qu’on fasse aussi parfois le deuil de nos rancœurs, parce qu’il y en a, mais qui nécessitent d’être mises au placard pour pouvoir sauver l’essentiel », a-t-il déclaré à publicsenat.fr, « pour la première fois depuis Vichy, l’extrême droite peut l’emporter ». L’annonce d’Éric Ciotti a d’ailleurs déjà fait mouche à gauche. Carole Delga, présidente socialiste de la région Occitanie, qui incarnait jusque-là la ligne anti-Nupes du PS, a tweeté quelques minutes après l’intervention du parton des LR : « Je dis oui au front populaire qui change la vie des gens en actes. Un Front populaire ouvert et le plus large possible. J’y prendrai toute ma part avec ce que je suis : une femme libre, socialiste qui n’a jamais cédé ni aux sirènes macronistes, ni aux sirènes mélenchonistes. L’Histoire nous regarde : j’appelle chacune et chacun à être à la hauteur des enjeux. ». Une ouverture de la part de celle qui n’a jamais ménagé ni le camp insoumis ni les accords passés entre eux et son parti par la direction.
Circonscriptions : « Il y aura un rééquilibrage [en faveur du PS] »
Les négociations vont toujours bon train entre les chefs à plume de la gauche, qui avancent et présenterons dans les heures ou les jours à venir leurs axes programmatiques. Quant à la répartition des circonscriptions, personne ne sait encore quelle répartition serait envisagée pour chaque composante. « Il y aura un rééquilibrage [en faveur du PS], tout le monde est d’accord là-dessus », a annoncé Olivier Faure. Aux élections européennes de dimanche, la liste du parti à la rose est arrivée devant la liste insoumise, la devançant de près de quatre points, et loin devant la liste des écologistes. « Il faut tenir compte de cette réalité qui s’est imposée », a justifié le socialiste, « c’est un vote des Françaises et des Français, ce n’est pas moi qui le dis ».
Les sénateurs du groupe communiste républicain écologiste et citoyen - kanaky (CRCE-k) ont déposé, ce 25 juillet, une proposition de loi constitutionnelle visant à préciser le statut de gouvernement démissionnaire.
Les élus sont souvent une cible privilégiée pour les ingérences étrangères. Si les atteintes à la probité existent, les formes d’influences sont diverses et se renouvellent. Après l’adoption de la loi sur les ingérences étrangères le 5 juin dernier, retour sur les règles s’appliquant aux élus pour prévenir les ingérences.
A la tête des Patriotes, le troisième groupe le plus important numériquement au Parlement européen et désormais membre de la prestigieuse commission des affaires étrangères, Jordan Bardella entend poursuivre à Strasbourg sa stratégie de « normalisation ». Une stratégie compromise cependant par le « cordon sanitaire » des partis pro-européens contre l’extrême-droite et par certaines personnalités embarrassantes au sein de son camp.
Le 24 juillet, Olivier Faure a adressé à Didier Roland-Tabuteau, vice-président du Conseil d’Etat, un courrier pour alerter la juridiction administrative sur l’exercice du pouvoir réglementaire par le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal. Si cette lettre interroge les diverses nominations à effet différé qui ont eu lieu au cours des deux derniers mois, elle constitue en réalité davantage un message politique qu’un véritable recours contentieux.
L’appel d’Éric Ciotti à constituer une alliance avec le Rassemblement national suscite la stupéfaction dans les deux groupes parlementaires du parti. Au Sénat, Gérard Larcher et les sénateurs LR demandent à Éric Ciotti de démissionner de ses fonctions de président du parti.
L’annonce de législatives anticipées a pris de court la classe politique, alors que le Rassemblement national est arrivé largement en tête des élections européennes ce dimanche soir. Quelques heures après l’annonce du président de la République, l’hypothèse d’une coalition face à l’extrême droite est loin de faire l’unanimité chez les élus interrogés par Public Sénat.