FRA : SENAT : Projet de loi de gestion de la crise sanitaire

Projet de loi immigration : retrouvez, point par point, le contenu du texte qui arrive ce lundi au Sénat

Public Sénat a décortiqué le projet de loi immigration qui sera débattu à partir du 6 novembre au Sénat. Le texte, aussi bien décrié à droite qu’à gauche, s’articule autour de deux principes phares : une régularisation temporaire des étrangers dans les secteurs en tension et une meilleure exécution des expulsions.
Romain David

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Plus de neuf mois après son dépôt sur le bureau du Sénat, le projet de loi immigration arrive en séance publique ce lundi 6 novembre. La Chambre haute, qui a la primeur de l’examen parlementaire sur ce texte, a déjà procédé à de profonds remaniements en commission, avec une vingtaine d’articles supplémentaires. Largement issus des travaux de la droite sur les questions migratoires, ils viennent durcir la version initialement présentée par l’exécutif. Tour d’horizon des principales dispositions :

Un débat annuel sur l’immigration

Ce texte s’ouvre ainsi par une longue série de dix articles additionnels, ajoutés lors de l’examen en commission des lois. La première mesure a été inscrite à initiative de Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat, et reprend une vieille idée de la droite : la tenue annuelle d’un débat parlementaire sur l’immigration au cours duquel seraient fixés, pour une durée de trois ans, les quotas de personnes admises à séjourner sur le territoire selon les titres de séjour.

Limiter le regroupement familial

D’autres dispositions visent à restreindre les conditions du regroupement familial. Désormais, il faudra justifier d’au moins 24 mois de présence sur le sol français, contre 18 actuellement, pour pouvoir formuler une demande de regroupement. Par ailleurs, le demandeur devra avoir une assurance maladie et présenter un certain niveau de revenus. Plusieurs sénateurs LR entendent profiter des débats en séance publique pour durcir encore un peu plus le dispositif. Ainsi, Stéphane Le Rudulier, élu des Bouches-du-Rhône, a déposé un amendement qui prévoit d’abaisser à 16 ans, au lieu de 18 ans, l’âge maximal d’éligibilité au regroupement familial pour les enfants du demandeur.

Suppression de l’aide médicale d’Etat (AME)

Il est également question dans ces articles introductifs du dispositif « étranger malade », qui permet d’accueillir un étranger qui n’aurait pas accès aux soins dans son pays d’origine. Les sénateurs ont remplacé cette condition par le critère plus restrictif « d’absence de traitement dans le pays d’origine », qui était déjà celui en place avant 2016.

L’Aide médicale d’Etat (AME), régulièrement qualifiée de « pompe aspirante » de l’immigration par la droite, a également été supprimée par la commission des lois. Elle est remplacée par une aide médicale d’urgence, centrée sur un panier de soins plus réduit qui comprend « la prophylaxie et le traitement des maladies graves et des douleurs aiguës, les soins liés à la grossesse, les vaccinations réglementaires et les examens de médecine préventive ».

Ces modifications ont suscité des réactions diverses au sein du gouvernement. Approuvées par Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, elles ont été dénoncées par le ministre de la Santé Aurélien Rousseau et le porte-parole du gouvernement Olivier Véran. La Première ministre Élisabeth Borne a commandé un rapport sur cette question début octobre. Ses conclusions – plutôt favorables au maintien de l’AME telle qu’elle existe actuellement – devraient servir d’appui à la ligne qui sera défendue par l’exécutif au cours des débats.

La maîtrise du français, condition sine qua non à l’obtention d’un titre de séjour

L’article 1er du projet de loi conditionne la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle à un niveau minimal de maîtrise du français. Les sénateurs ont doublé cette exigence d’un examen civique, avec des questions relatives à l’histoire et à la culture française. Par ailleurs, les bénéficiaires du regroupement familial devront aussi faire montre d’un niveau de langue minimal avant leur arrivée sur le territoire national.

L’article 2, supprimé par la commission, visait à étoffer la formation en langue française des salariés étrangers. Le gouvernement et la gauche entendent réintroduire ce dispositif.

Viennent ensuite deux articles additionnels, qui s’attaquent aux conditions d’acquisition de la nationalité française. Les mineurs étrangers nés en France de parents étrangers pourront acquérir la nationalité française, à condition d’en faire la demande entre 16 et 18 ans et de justifier d’au moins cinq ans de résidence sur le territoire national.

La régularisation de certains travailleurs étrangers

L’article 3 prévoit la création d’une carte de séjour temporaire pour les travailleurs étrangers des secteurs en tension. Il s’agit d’une expérimentation qui coure jusqu’à fin 2026. Ce point du texte ne sera certainement pas débattu avant le mardi 7 novembre, voire le mercredi 8. Il constitue la principale mesure d’intégration du projet de loi, mais aussi l’une des plus polémiques. Les LR y sont farouchement opposés, et dénoncent « un appel d’air ». À rebours, leurs alliés centristes sont plutôt favorables au dispositif au nom d’un principe économique. En face, la gauche voudrait élargir le périmètre d’application à l’ensemble des secteurs et des types de travailleurs, de manière à toucher aussi les saisonniers et les plateformes numériques.

Durant l’examen en commission, les élus, bien conscients du caractère particulièrement clivant de l’article 3, n’ont pas souhaité l’amender, laissant la primeur à la discussion publique. Ce qui laisse augurer d’âpres débats dans l’hémicycle du Sénat.

L’article 4 permet à certains demandeurs d’asile d’avoir immédiatement accès au marché du travail, contre un délai d’au moins six mois après introduction de leur demande dans la législation actuelle. Là encore, les LR sont vent debout contre cette mesure. Devant l’absence de consensus, la commission des lois du Sénat s’est abstenue de toute modification et a également réservé l’ensemble du débat sur cet article à la séance publique.

Le gouvernement entend réintroduire l’article 5, qui lie l’obtention du statut d’autoentrepreneur par un étranger à la régularité de son séjour en France. Il a été supprimé par la commission, qui a estimé que cette obligation était déjà prévue par plusieurs textes réglementaires. Les articles 6 et 7 modifient les dispositions relatives à différents titres de séjour, notamment ceux attribués aux praticiens de santé dont le diplôme a été obtenu en dehors de l’UE. L’article 8, qui durcissait les sanctions prévues contre les employeurs de clandestins a été supprimé du texte établi en commission à l’initiative de la gauche. Là encore, le gouvernement compte le rétablir.

Vers un retour de la « double peine »

La deuxième partie du projet de loi se concentre sur l’efficience des dispositifs d’éloignement des étrangers considérés comme une menace pour l’ordre public. Le tour de vis concerne principalement les articles 9 et 10, qui doivent faciliter l’exécution des obligations de quitter le territoire (OQTF), en levant les protections dont peuvent bénéficier certains étrangers en raison des liens, familiaux notamment, qu’ils ont pu développer en France. La gauche y voit un retour de la « double peine », qui permet d’associer une condamnation de justice et une expulsion. Bruno Retailleau se veut plus explicite, puisqu’il a déposé un amendement qui autorise clairement « le juge judiciaire à prononcer une peine complémentaire d’interdiction du territoire français à l’encontre de tout étranger reconnu coupable d’une infraction, quel que soit son degré de gravité ».

Les articles suivants portent différentes mesures de coercition à l’encontre des étrangers responsables d’infractions, l’article 11 en particulier autorise le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies sans le consentement de l’intéressé, et ce afin de faciliter son identification. Un article additionnel prévoit également la création d’un fichier des étrangers impliqués dans des infractions pénales et qui se déclarent mineurs.

Un retrait des titres de séjour pour non-respect des « principes de la République »

L’article 13 introduit de nouvelles conditions à l’obtention d’un titre de séjour, incluant notamment « le respect des principes de la République ». Notons qu’une disposition similaire figurait en 2021 dans le projet de loi confortant le respect des principes de la République, finalement censurée par le Conseil constitutionnel qui avait estimé la formulation trop vague pour « déterminer avec suffisamment de précision les comportements justifiant le refus de délivrance ou de renouvellement d’un titre de séjour ou le retrait d’un tel titre ».

Pour pallier cette difficulté, l’article 13 du projet de loi immigration introduit une liste de six principes républicains, parmi lesquelles la liberté d’expression, l’égalité entre les hommes et les femmes et le respect de la laïcité.

Contraindre les pays d’origine à reprendre leurs ressortissants

Avec l’article 14 A, le Sénat assortit le projet de loi d’un important volet diplomatique. Les sénateurs souhaitent inscrire dans la loi la possibilité pour le gouvernement de moduler l’aide au développement ou de restreindre l’attribution de visas pour les pays qui refusent de reprendre leurs ressortissants frappés par une OQTF.

Les articles 14 à 18 s’attaquent à l’exploitation des migrants, avec des sanctions ciblant, entre autres, les passeurs et les marchands de sommeil. L’article 19 porte des mesures administratives destinées à faciliter le parcours du demandeur d’asile. Pour un certain nombre de cas de figure (délivrance d’informations mensongères, utilisation d’une fausse identité, etc.), la commission des lois a souhaité systématiser les restrictions aux aides (allocation, hébergement dans une structure dédiée) dont ils peuvent bénéficier. Enfin, le texte s’achève par diverses dispositions techniques relatives au traitement des contentieux administratifs et judiciaires concernant l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers. Il s’agit dans la plupart des cas de simplifier des procédures qui avaient été jugées complexes et peu lisibles par le Conseil d’État dans un rapport de 2020.

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